Conseil 20202823 - Séance du 08/10/2020

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Conseil 20202823 - Séance du 08/10/2020

Agence régionale de santé d'Ile-de-France (ARS - Direction générale)

La commission d'accès aux documents administratifs a examiné, lors de sa séance du 8 octobre 2020, votre demande de conseil relative au caractère communicable, à un avocat représentant les familles de résidents décédés, de l'ensemble des données chiffrées issue d’une procédure de recensement, quotidienne, auprès des 700 établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) franciliens, mise en place durant la crise sanitaire (Covid-19) conformément aux directives nationales.

La commission relève que dans le cadre de directives nationales, l’Agence régionale de santé de la région Ile-de-France a mis en place, durant la période du confinement, à compter de la fin du mois de mars 2020, une procédure de recensement, quotidienne, auprès des 700 établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes de la région, qu’ils soient publics ou privés, de diverses données chiffrées relatives à la Covid 19 et aux résidents de ces établissements, au nombre desquelles, le nombre de décès en lien avec l’épidémie survenus dans l’établissement ou en structure hospitalière.

Il a été indiqué à la commission que ces données, déclaratives, ne faisaient pas l’objet d’un contrôle de leur exactitude par l’administration mais qu’elles ont permis d’assurer un suivi.

La commission rappelle, en premier lieu, qu’aux termes de l’article L300-2 du code des relations entre le public et l'administration, sont considérés comme documents administratifs, au sens des titres Ier, III et IV du présent livre, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l'Etat, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission. Constituent de tels documents notamment les dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès-verbaux, statistiques, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles, correspondances, avis, prévisions, codes sources et décisions.

En l’espèce, la commission estime que ces statistiques et la base de données ainsi constituée, sont des documents administratifs relevant du droit d’accès régi par le livre III du titre Ier du code des relations entre le public et l'administration.

La commission précise, en second lieu, que l’accès aux documents administratifs n’est, en principe, subordonné à aucune exigence de qualité ou d’intérêt pour agir, sauf exceptions limitativement définies par la loi (CE 21 juillet 1989, Association SOS Défense et X, n° 34954, Lebon T. p. 687) et il n’est dérogé à ce principe que lorsque le code des relations entre le public et l'administration prévoit que certains documents ne sont accessibles qu’à l’intéressé ou encore lorsque certaines dispositions législatives ont mis en place un régime particulier d’accès dont le bénéfice est réservé à des personnes déterminées.

La commission considère, en l’espèce, que les statistiques élaborées par l’Agence régionale de santé sont communicables à toute personne qui en fait la demande, indépendamment de tout lien de parenté entre un demandeur et un résident des 700 établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes de la région. Ainsi, une même personne est-elle fondée à solliciter la communication de l’ensemble des statistiques détenues par l’administration, sans avoir à justifier d’une quelconque qualité ou d’un intérêt.

La commission souligne, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration ne sont communicables qu’à la personne intéressée, c’est-à-dire celle que le document ou les mentions concernent directement, ceux dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée, au secret médical et au secret des affaires (1°), portant une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable (2°) ou faisant apparaître le comportement d'une personne, dès lors que la divulgation de ce comportement pourrait lui porter préjudice (3°).

En l’espèce, la commission, qui a pris connaissance d’un extrait des statistiques sollicitées qui fait apparaître, le n° FINESS de l’établissement, son nom, l’entité gestionnaire, son statut, son département et sa commune, le nombre de lits, et le total des personnes décédées au 30 juin chez les usagers, répartis entre ceux qui sont décédés dans l’établissement ou ceux qui y étaient hébergés mais sont décédés à l’hôpital, estime qu’elles ne comprennent aucune mention couverte par la protection de la vie privée, le secret médical ou le secret des affaires.

Elle considère également, d’une part, que les statistiques, eu égard à leur objet, ne portent pas une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, nommément désignée ou facilement identifiable et, d’autre part, que si la communication d’un chiffre de décès élevé, rapporté au nombre de lits d’un établissement et comparé aux autres établissements est susceptible de porter préjudice à l’établissement en cause, alors même que ce rapprochement n’a pas de pertinence scientifique, ces données brutes, qui ne sont pas intrinsèquement liées aux conditions de prise en charge et peuvent s’expliquer par de multiples facteurs, ne sont pas, en elles-mêmes, révélatrices d’un comportement de ces établissements dont la divulgation serait susceptible de leur porter préjudice. Le 2° et 3° de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l'administration ne font donc pas obstacle à leur communication à des tiers.

Elle précise, enfin, que sont sans incidence au regard du droit d’accès aux documents administratifs, les circonstances que les données recueillies soient déclaratives, nécessairement imparfaites, voire parcellaires, ce qui ne leur confère pas un caractère inachevé au sens de l’article L311-2 qui s’apprécie au regard du déroulement du processus d’élaboration d’un document et non pas à l’exactitude de son contenu ou que ces données puissent donner lieu à une utilisation erronée.

La commission considère, par suite, que les données dont la communication vous est demandée sont communicables à toute personne qui en fait la demande sur le fondement des dispositions de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration et vous invite à y répondre favorablement.