Avis 20220646 - Séance du 21/04/2022

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Avis 20220646 - Séance du 21/04/2022

Préfecture du Cantal

Monsieur X a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 7 février 2022, à la suite du refus opposé par le préfet du Cantal à sa demande de copie, par voie électronique, des listes électorales de toutes les communes du département.

La commission relève, à titre liminaire, que la présente demande s’inscrit dans le cadre d’une série de demandes portant sur des documents de même nature et ayant le même objet, adressées par le même demandeur à dix-sept préfectures. En application de l’article 8 quater C de son règlement intérieur, cette demande a été choisie par la commission pour être examinée lors de sa séance du 21 avril 2022 en partie II, afin de dégager les principes de communication communs aux documents demandés et de procéder à une appréciation des données de fait susceptibles de varier d’un dossier à l’autre. La solution adoptée dans cet avis sera ensuite reprise dans les autres dossiers de la série donnant lieu à un avis de partie III inscrit à la même séance.

En premier lieu, la commission rappelle qu’une demande de communication de documents administratifs qui lui est adressée est déclarée sans objet lorsque l'autorité saisie communique spontanément le document demandé postérieurement à l’enregistrement de la demande ou lorsqu'il résulte des indications fournies par cette autorité que le document demandé n'a jamais existé, a été détruit ou a été égaré.

Elle précise également, à toutes fins utiles, que le refus de communication n’est pas établi et la demande d’avis est déclarée irrecevable, lorsque l’administration saisie d’une demande de communication, communique spontanément dans les délais qui lui sont impartis le document demandé au demandeur.

En second lieu, la commission rappelle qu'aux termes de l'article L37 du code électoral : « Tout électeur peut prendre communication et obtenir copie de la liste électorale de la commune à la mairie ou des listes électorales des communes du département à la préfecture, à la condition de s'engager à ne pas en faire un usage commercial. (...) ».

Ainsi que l’a précisé le Conseil d’État, « ces dispositions, qui ont pour objet de concourir à la libre expression du suffrage, ouvrent au profit de tout électeur, régulièrement inscrit sur une liste électorale, le droit de prendre communication et copie de la liste électorale d'une commune » (CE, 2 décembre 2016, n° 388979). La seule qualité d'électeur suffit, sans qu'il soit besoin d'être inscrit sur la liste dont la communication est demandée. Pour en obtenir communication, le demandeur doit donc prouver qu'il a cette qualité. La commission estime, dans le silence des textes, que cette preuve peut être apportée par tout moyen, sans qu’il y ait lieu d’exiger la production d’un titre d’identité ou de la carte d’électeur. Elle considère qu’une attestation sur l’honneur peut suffire, dès lors que le demandeur produit les éléments permettant à l’administration de vérifier l’effectivité de son inscription sur une liste électorale, à savoir son nom, son prénom, et le nom de la commune où il allègue être inscrit (conseil n° 20183023 du 28 juin 2018).

La commission rappelle ensuite que le législateur a subordonné l'exercice du droit d'accès aux listes électorales à l'engagement, de la part du demandeur, de ne pas en faire un usage commercial afin d'éviter toute exploitation commerciale des données personnelles que comprennent ces listes. Elle considère dès lors que l'autorité compétente est fondée à rejeter la demande de communication dont elle est saisie s'il existe, au vu des éléments dont elle dispose, nonobstant l'engagement pris par le demandeur, des raisons sérieuses de penser que l'usage des listes électorales risque de revêtir, en tout ou partie, un caractère commercial.

La commission estime que le caractère commercial ou non de l’usage des listes s’apprécie notamment au regard de l’objet de la réutilisation envisagée et de l’activité dans laquelle elle s’inscrit, la forme juridique retenue par le demandeur pour poursuivre cet objectif et l'existence ou l'absence de ressources tirées de cet usage constituant à cet égard de simples indices. A cet effet, la commission estime qu'il est loisible à l'autorité compétente de solliciter du demandeur qu'il produise tout élément d'information de nature à lui permettre de s'assurer de la sincérité de son engagement de ne faire de la liste électorale qu'un usage conforme aux dispositions de l'article L37 du code électoral. L'absence de réponse à une telle demande peut être prise en compte, parmi d'autres éléments, par l'autorité compétente afin d'apprécier les suites qu'il convient de réserver à la demande dont elle est saisie.

En l’espèce, la commission relève que Monsieur X, résidant à X dans le département X, a demandé la communication des listes électorales des communes de plusieurs départements au motif de « vérifier des inscriptions ou des non inscriptions de certains électeurs du département ». La commission constate que Monsieur X certifie ne pas formuler sa demande dans un but commercial et précise l’objectif poursuivi. Par conséquent, en l’absence de tout élément concret lui permettant de considérer que l'usage des listes sollicitées risquerait de revêtir, en tout ou partie, un caractère commercial, la commission ne peut qu’émettre un avis favorable à la demande.

La commission rappelle enfin que le demandeur, en tant que réutilisateur des listes électorales ainsi communiquées, devra se conformer aux dispositions de la loi du 6 janvier 1978 et du règlement général sur la protection des données (RGPD) dès lors qu'il sera alors regardé comme un responsable de traitement de données à caractère personnel. Il devra notamment s'assurer que l'usage qu'il entend faire des listes électorales respecte les principes relatifs au traitement des données à caractère personnel, les conditions de licéité d'un tel traitement et les droits des personnes concernées, définis respectivement aux articles 5, 6, 7 et au chapitre III du RGPD.