Avis 20221246 - Séance du 21/04/2022
La commission relève, à titre liminaire, que la présente demande s’inscrit dans le cadre d’une série de demandes portant sur des documents de même nature et ayant le même objet, adressées par le même demandeur à cent-seize communes et établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). En application de l’article 8 quater D de son règlement intérieur, la commission a décidé, pour des considérations de bonne administration, d’émettre un seul avis dégageant les principes de communication communs aux documents demandés et procédant à une appréciation globale des données de fait susceptibles de varier d’un dossier à l’autre. L’avis ainsi émis s’applique à l’ensemble des demandes rattachées à cette série.
Madame X, pour le compte de X, a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 27 février 2022, à la suite du refus opposé par le maire de Castres à sa demande de copie, par voie électronique, des documents (conventions, contrats, annexes, factures, etc.), relatifs à la gestion des pigeons sur son territoire (pigeonnier, capture, stérilisation) sur l’année en cours ainsi que sur les trois dernières années. Cette demande a été choisie par la commission pour être examinée lors de sa séance du 21 avril 2022 en partie II et sera donc applicable à l’ensemble des demandes formulées par Madame X suite aux refus opposés par les cent-quinze autres communes et EPCI, et identifiées comme se rattachant à la présente série.
En premier lieu, la commission rappelle qu’une demande de communication de documents administratifs qui lui est adressée est déclarée sans objet lorsque l'autorité saisie communique spontanément le document demandé postérieurement à l’enregistrement de la demande ou lorsqu'il résulte des indications fournies par cette autorité que le document demandé n'a jamais existé, a été détruit ou a été égaré.
Elle précise également, à toutes fins utiles, que le refus de communication n’est pas établi et la demande d’avis est déclarée irrecevable, lorsque l’administration saisie d’une demande de communication, communique spontanément dans les délais qui lui sont impartis le document demandé au demandeur.
En second lieu, s’agissant des contrats de prestations de service ou de fournitures conclus par les collectivités pour la gestion des pigeons, la commission rappelle qu'une fois signés, les marchés publics et les documents qui s’y rapportent sont des documents administratifs soumis au droit d'accès institué par le livre III du code des relations entre le public et l’administration. Ce droit de communication, dont bénéficient tant les entreprises non retenues que toute autre personne qui en fait la demande, doit toutefois s'exercer dans le respect du secret des affaires, protégé par les dispositions de l’article L311-6 de ce code.
Il résulte de la décision du Conseil d’État du 30 mars 2016, « Centre hospitalier de Perpignan » (n° 375529), que, lorsqu’elles sont saisies d’une demande de communication de documents relatifs à un marché public, les autorités mentionnées à l’article L300-2 du même code doivent examiner si les renseignements contenus dans ces documents peuvent, en affectant la concurrence entre les opérateurs économiques, porter atteinte au secret des affaires et faire ainsi obstacle à cette communication.
Le Conseil d’État a en outre précisé qu’au regard des règles de la commande publique, doivent être regardées comme communicables, sous réserve des secrets protégés par la loi, l’ensemble des pièces d’un marché public et que, dans cette mesure, l’acte d’engagement, le prix global de l’offre et les prestations proposées par l’entreprise attributaire, notamment, sont en principe communicables. Sont également communicables les pièces constitutives du dossier de consultation des entreprises (règlement de consultation, cahier des clauses administratives particulières, cahier des clauses techniques particulières, etc.).
En revanche, les éléments qui reflètent la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité concurrentiel et dont la divulgation est susceptible de porter atteinte au secret des affaires ne sont, en principe, pas communicables. Il en va ainsi de l’offre de prix détaillée contenue dans le bordereau des prix unitaires, la décomposition du prix global et forfaitaire ou le détail quantitatif estimatif, ainsi que du mémoire technique, qui ne sont, de fait, pas communicables aux tiers.
L’examen de l’offre des entreprises non retenues au regard des mêmes principes conduit de même la commission à considérer que leur offre de prix globale est, en principe, communicable mais qu’en revanche, le détail technique et financier de cette offre ne l’est pas.
En outre, pour l’entreprise attributaire comme pour l’entreprise non retenue, les dispositions de l’article L311-6 du code des relations entre le public et l’administration doivent entraîner l’occultation des éléments suivants :
- les mentions relatives aux moyens techniques et humains, à la certification de système qualité, aux certifications tierces parties ainsi qu'aux certificats de qualification concernant la prestation demandée, ainsi que toute mention concernant le chiffre d'affaires, les coordonnées bancaires et les références autres que celles qui correspondent à des marchés publics ;
- dans les documents préparatoires à la passation du marché (procès-verbaux, rapports d'analyse des offres), les mentions relatives aux détails techniques et financiers des offres de toutes les entreprises.
Par ailleurs, s’agissant des factures relatives à la gestion des pigeons reçues par les communes et les EPCI, la commission rappelle qu’il résulte des articles L2121-26 et L5211-46 du code général des collectivités territoriales que toute personne physique ou morale a le droit de demander communication des procès-verbaux des organes délibérants des communes ou des EPCI, des arrêtés de l’organe exécutif, ainsi que de leurs budgets et de leurs comptes. L’ensemble des pièces annexées à ces documents, y compris les pièces justificatives des comptes, telles les factures, sont communicables à toute personne qui en fait la demande selon les modalités prévues par l’article L311-9 du code des relations entre le public et l’administration.
La commission précise toutefois que, si les articles L2121-26 et L5211-46 du code général des collectivités territoriales ont institué un régime spécifique d'accès aux documents des collectivités territoriales et de leurs groupements, distinct du régime général d'accès aux documents administratifs organisé par les dispositions du code des relations entre le public et l'administration, et si les exceptions au droit d'accès prévues à l'article L311-6 de ce code ne sont pas opposables à une demande présentée sur le fondement des dispositions spéciales des articles L2121-26 et L5211-46 du code général des collectivités territoriales, l'exercice de ce droit d'accès particulier ne saurait faire obstacle, par principe, à la protection de secrets protégés par la loi sur d'autres fondements, tels que le secret de la vie privée ou le secret industriel et commercial (CE, 17 mars 2022, M. X, n° 449620).
La commission estime, par suite, que les factures afférentes à un marché public émises par les communes, les EPCI ou leurs établissements publics administratifs, sont des documents administratifs communicables à toute personne en faisant la demande sur le fondement des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales, sous réserve de l’occultation des mentions couvertes par le secret des affaires. A ce titre, le détail des prix, susceptible, en soi, de refléter la stratégie commerciale d’une entreprise opérant dans un secteur d’activité déterminé, doit être occulté.
Par ailleurs, compte tenu de l’objet de la demande qui porte sur la gestion d’une espèce animale, la commission considère que, dans l’hypothèse où les documents demandés contiendraient des informations relatives à l’environnement au sens de l’article L124-2 du code de l’environnement, celles-ci seraient alors communicables en application des articles L124-1 et suivants du même code et de l’article L311-1 du code des relations entre le public et l’administration.
La commission émet donc un avis favorable à la communication des documents sollicités par Madame X, pour le compte de X, sous les réserves précitées.
Enfin, la commission rappelle qu’il appartient à la commune ou à l’EPCI qui ne serait pas en possession des documents sollicités, en application du sixième alinéa de l’article L311-2 du code des relations entre le public et l’administration, de transmettre la demande de communication, accompagnée du présent avis, à l’autorité administrative susceptible de le détenir, et d’en aviser le demandeur