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Avis 20225624 - Séance du 13/10/2022
Madame X, pour le compte de l’association de défense de la cause animale « X », a saisi la Commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 7 septembre 2022, à la suite du refus opposé par le préfet du Rhône à sa demande de communication des documents suivants, relatifs aux espèces classées et susceptibles d'occasionner des dégâts dans le département :
1) les bilans des destructions réalisées en application de l’article R427‐8 du code de l’environnement pour les périodes du 1er juillet 2018 au 30 juin 2019, du 1er juillet 2019 au 30 juin 2020, du 1er juillet 2020 au 30 juin 2021 et du 1er juillet 2021 au 30 juin 2022, en vertu de l’article R427‐6 2° du code de l’environnement et de l’arrêté du 3 juillet 2019 pris pour son application ;
2) les bilans des dégâts compilés en indiquant notamment l’évaluation monétaire des dégâts, leur nature, leur ampleur, leur localisation pour les années 2019 et 2020 ainsi que pour l’année 2021 et les six premiers mois de l’année 2022 ;
3) les bilans des destructions administratives réalisées le cas échéant à l’encontre de ces espèces en application de l’article L427‐6 du code de l’environnement pour les années 2019, 2020 et 2021 ;
4) les bilans des comptages effectués en 2019, 2020, 2021 et 2022 notamment par indice kilométrique d’abondance pour le renard ;
5) les éventuels témoignages fournis par les maires, piégeurs, lieutenants de louveterie, agriculteurs et chasseurs s’agissant de la présence de ces espèces dans le département pour les années 2019 à 2021.
La commission relève, à titre liminaire, que la présente demande s’inscrit dans le cadre d’une série de demandes portant sur des documents de même nature et ayant le même objet, adressées par le même demandeur à quatre-vingt-deux préfectures. En application de l’article 8 quater C de son règlement intérieur, cette demande a été choisie par la commission pour être examinée lors de sa séance du 13 octobre 2022 en partie II, afin de dégager les principes de communication communs aux documents demandés et de procéder à une appréciation des données de fait susceptibles de varier d’un dossier à l’autre. La solution adoptée dans cet avis sera ensuite reprise dans les autres dossiers de la série donnant lieu à un avis de partie III inscrit à la même séance.
En premier lieu, la commission rappelle qu’une demande de communication de documents administratifs qui lui est adressée est déclarée sans objet lorsque l'autorité saisie communique spontanément le document demandé postérieurement à l’enregistrement de la demande ou lorsqu'il résulte des indications fournies par cette autorité que le document demandé n'a jamais existé, a été détruit ou a été égaré.
Elle précise également, à toutes fins utiles, que le refus de communication n’est pas établi et la demande d’avis est déclarée irrecevable, lorsque l’administration saisie d’une demande de communication, communique spontanément dans les délais qui lui sont impartis le document demandé au demandeur.
La commission rappelle, en second lieu, qu'aux termes des 1er et 2e alinéas de l’article L311-2 du code des relations entre le public et l’administration : « Le droit à communication ne s'applique qu'à des documents achevés. Il ne concerne pas les documents préparatoires à une décision administrative tant qu'elle est en cours d'élaboration ».
En application de ces dispositions, la commission distingue ainsi deux types de documents :
- les documents inachevés en la forme, tels que les ébauches, brouillons et versions successives d'un document, qui précèdent l'élaboration d'un document complet et cohérent, et qui ne peuvent être communiqués en l'état. Seul le document achevé sera communicable, le cas échéant.
- les documents préparatoires, lesquels ont acquis leur forme définitive, mais dont la communication est subordonnée à l’intervention de la décision administrative qu'ils préparent.
La commission précise en outre que, selon les articles L124-1 et L124-3 du code de l'environnement, le droit de toute personne d'accéder aux informations relatives à l'environnement, au sens de l'article L124-2 du code de l'environnement, détenues, reçues ou établies par l'administration s'exerce dans les conditions définies par le titre III du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve des dispositions du chapitre IV du titre II du livre I du code de l'environnement. A cet égard, les articles L124-4 et L124-5 de ce code énumèrent limitativement les hypothèses dans lesquelles l'autorité administrative peut rejeter une demande tendant à la communication d'informations relatives à l'environnement, au nombre desquelles ne figure pas le caractère préparatoire du document ou des informations. En revanche, le 2° du II de l'article L124-4 du même code permet à l'administration de rejeter une demande de communication portant sur des documents en cours d'élaboration. Dans ce cas, le II de l’article L124-6 du même code précise que la décision de l’administration rejetant la demande indique le délai dans lequel le document sera achevé ainsi que l’autorité publique chargée de son élaboration.
Pour l’application de ces dispositions, la commission considère qu’un document doit être regardé comme présentant un caractère achevé, dès lors qu’il n’est plus en cours d’élaboration et qu’il a été communiqué, sous une forme définitive, à l’administration dans le cadre de sa mission de service public. Cette appréciation doit être faite en fonction des caractéristiques propres des documents dont la communication est demandée, sans qu’il soit besoin de rechercher si, au sens de la réglementation en cause, le dossier auquel se rattachent les documents revêt ou non un caractère complet.
La commission rappelle ensuite que le droit à communication posé par le livre III du code des relations entre le public et l'administration ne s'applique qu'à des documents existants et ne fait pas obligation aux autorités administratives de répondre aux demandes de renseignements qui leur sont adressées, ni d'élaborer un document nouveau en vue de procurer les renseignements ou l'information souhaités (CE, 30 janvier 1995, Ministre d'État, Ministre de l’éducation nationale, n° 128797 ; CE, 22 mai 1995, X, n° 152393)
Elle relève toutefois que le régime particulier prévu par le chapitre IV du titre II du livre Ier du code de l’environnement porte, à la différence du régime général d'accès aux documents administratifs, sur les « informations » et non uniquement sur les documents relatifs à l’environnement. Elle en déduit que dès lors que l’administration détient de telles informations, figurant ou non sur un document existant, elles sont communicables à toute personne qui en fait la demande en application de l’article L124-3 de ce code, ce dernier n’imposant aucune exigence de formalisation préalable de l'information demandée, et qu’il appartient alors à l’administration, saisie d’une demande en ce sens, d’élaborer un document comportant les informations sollicitées.
En réponse aux demandes d’observations qui leur ont été adressées, trente préfectures ont fait valoir que les données sollicitées étaient en cours de collecte par leurs services ou n’avaient pas encore pu être compilées. La commission ne peut, dès lors, qu’émettre, en l'état, un avis défavorable à la demande en ce qu’elle porte sur des documents inachevés. Elle précise néanmoins, qu’une fois achevées, les informations sollicitées seront communicables au demandeur et relève que les préfectures concernées ont, en application du II de l'article L124-6 du code de l'environnement, informé Madame X que les documents sollicités seront achevés et lui seront transmis avant la fin du mois de décembre 2022.
La commission rappelle, au surplus, qu’il appartient aux préfectures qui ne seraient pas en possession des informations sollicitées, en application du sixième alinéa de l’article L311-2 du code des relations entre le public et l’administration, de transmettre la demande de communication, accompagnée du présent avis, à l’autorité administrative susceptible de le détenir, et d’en aviser le demandeur.