Avis 20176028 - Séance du 05/04/2018
Monsieur X a saisi la commission d'accès aux documents administratifs, par courrier enregistré à son secrétariat le 15 décembre 2017, à la suite du refus opposé par le président de la communauté de communes du Grand Chambord à sa demande de mise en ligne de documents issus du conseil communautaire du 25 septembre 2017 :
I) la note de synthèse ;
II) les documents préparatoires ;
III) les délibérations datées et signées, avec les annexes, notamment :
1) la convention de mise à disposition du service administratif de la commune de Saint-Laurent-Nouan à la communauté de commune du grand Chambord (CCGC) alors que le document publié est un projet non servi et non signé ;
2) le tableau des effectifs de la CCGC au 1er octobre 2017 ;
3) la convention signée entre le représentant de l'Etat et la CCGC pour la télétransmission des actes soumis au contrôle de légalité ;
4) l'avenant au bail commercial du « Gré du Vent » ;
5) le bail dérogatoire signé avec l'entreprise « CEMSAS » pour la location du box 3 des Champs Godins ;
6) la convention pour la mise en œuvre et la valorisation des certificats d'économie d'énergie pour la réalisation de travaux de rénovation énergétique sur les bâtiments publics des communes et l'éclairage public du territoire, dans le cadre du territoire à énergie positive pour la croissance verte ;
7) les conventions d'occupation de terrain privé-domaine public pour les structures artistiques du collectif DERIVE, alors que le document publié est un projet non servi et non signé ;
8) le rapport du CLECT sur l'enseignement musical ;
9) le rapport du CLECT sur les équipements sportifs couverts ;
10) le rapport du CLECT sur le PLUi ;
11) le rapport du CLECT sur les ZA communales ;
12) le dossier relatif au marché public : Mission de maîtrise d'œuvre pour des travaux d'éclairage public sur le territoire de la CCGC ;
13) le dossier relatif au marché public : Travaux du programme de voirie 2017 - Lot 2 réparation et enrobés ;
14) le dossier relatif au marché public : Élaboration d'un PLUi sur le territoire de la CCGC ;
15) le dossier relatif au marché public : Transports piscine et culture ;
16) l'avenant 1 au marché public : Travaux de renouvellement d'une conduite d'eau potable rue des Ecoles à Saint-Laurent-Nouan.
I. Rappel du cadre juridique :
La commission rappelle, d'une part, que l'article L311-9 du code des relations entre le public et l’administration (CRPA), dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique, dispose que : « L'accès aux documents administratifs s'exerce, au choix du demandeur et dans la limite des possibilités techniques de l'administration : 1° Par consultation gratuite sur place, sauf si la préservation du document ne le permet pas ; 2° Sous réserve que la reproduction ne nuise pas à la conservation du document, par la délivrance d'une copie sur un support identique à celui utilisé par l'administration ou compatible avec celui-ci et aux frais du demandeur, sans que ces frais puissent excéder le coût de cette reproduction, dans des conditions prévues par décret ; 3° Par courrier électronique et sans frais lorsque le document est disponible sous forme électronique ; 4° Par publication des informations en ligne, à moins que les documents ne soient communicables qu'à l'intéressé en application de l'article L311-6. » En complément de la possibilité de demander la consultation ou l’envoi d’un document administratif sous format papier ou numérique, la loi sur une République numérique a désormais introduit une quatrième modalité de communication par la mise en ligne sur internet du document sollicité.
La commission rappelle, d'autre part, que l’article L312-1 du CRPA prévoit que les administrations peuvent rendre publics les documents administratifs qu’elles produisent ou reçoivent. Le législateur leur a par ailleurs imposé l’obligation de publier en ligne certaines catégories particulières de documents. Le 1° de l'article L312-1-1 du CRPA prévoit ainsi que les collectivités territoriales de plus de 3 500 habitants et les administrations dont le nombre d'agents est supérieur à 50 équivalents temps plein doivent publier les documents qu'elles communiquent en application des procédures prévues au titre Ier du livre III du CRPA, à condition que ces documents soient effectivement disponibles sous forme électronique.
La publication en ligne de documents administratifs par l’administration ne peut toutefois s’effectuer que sous réserve du respect des conditions posées à l’article L312-1-2 du CRPA, qui dispose que : « Sauf dispositions législatives ou réglementaires contraires, lorsque les documents et données mentionnés aux articles L312-1 ou L312-1-1 comportent des mentions entrant dans le champ d'application des articles L311-5 ou L311-6, ils ne peuvent être rendus publics qu'après avoir fait l'objet d'un traitement permettant d'occulter ces mentions. / Sauf dispositions législatives contraires ou si les personnes intéressées ont donné leur accord, lorsque les documents et les données mentionnés aux articles L312-1 ou L312-1-1 comportent des données à caractère personnel, ils ne peuvent être rendus publics qu'après avoir fait l'objet d'un traitement permettant de rendre impossible l'identification de ces personnes. Une liste des catégories de documents pouvant être rendus publics sans avoir fait l'objet du traitement susmentionné est fixée par décret pris après avis motivé et publié de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. (...) ».
La commission déduit de ces dispositions les règles suivantes :
Pour pouvoir faire l’objet d’une publication (y compris par la mise en ligne sur internet) par l’administration, un document administratif doit, au regard des mentions qu’il contient, être communicable à toute personne. Ce document doit, en outre, satisfaire aux conditions posées au deuxième alinéa de l’article L312-1-2 s’agissant de la protection des données personnelles, s’il comporte des données de cette nature.
Lorsque les règles qui s’appliquent à la communication d’un document incluent les articles L311-5 et L311-6 du CRPA, il ne peut être procédé à la publication de ce document que si son contenu respecte les secrets protégés par ces deux articles.
En revanche, lorsque les règles de communication d’un document n’incluent pas, ou pas complètement, les articles L311-5 et L311-6 du CRPA, parce que celle-ci relève d’une législation spéciale, le contenu du document doit, pour pouvoir être publié, se conformer aux règles et principes issus de cette législation particulière et qui conditionnent sa communicabilité à toute personne.
L'article L5211-46 du code général des collectivités territoriales (CGCT), aux termes duquel : « Toute personne physique ou morale a le droit de demander communication sans déplacement et de prendre copie totale ou partielle des procès-verbaux des organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale, des budgets et des comptes de ces établissements ainsi que des arrêtés de leur président. Chacun peut les publier sous sa responsabilité. La communication des documents mentionnés au premier alinéa, qui peut être obtenue aussi bien du maire que des services déconcentrés de l'Etat, intervient dans les conditions prévues par l'article L311-9 du code des relations entre le public et l'administration. », constitue une législation spéciale qui déroge au régime de droit commun d’accès aux documents administratifs prévu par le titre Ier du livre III du CRPA. En effet, le Conseil d’Etat a jugé, dans sa décision n° 303814 Commune de Sète du 10 mars 2010, à propos de l'article L2121-26 du CGCT applicable aux communes, que ces dispositions instituent un régime particulier et autonome de communication, en vertu duquel les exceptions au droit d’accès prévues par les articles L311-5 et L311-6 du CRPA ne sont pas opposables à une demande présentée sur leur fondement. Ce raisonnement est transposable aux dispositions de l'article L5211-46 du CGCT qui concerne les documents détenus par les établissements publics de coopération intercommunale.
Les principes alors applicables sont ceux qui découlent de la jurisprudence « Commune de Sète ». Il résulte ainsi de cette décision, rendue à propos d’un arrêté individuel d’attribution de primes liées à la manière de servir, que ces dispositions du CGCT ne sauraient être interprétées, eu égard à leur objectif d’information du public sur la gestion municipale, comme prescrivant la communication des arrêtés portant des appréciations d’ordre individuel sur les fonctionnaires communaux.
La commission a estimé que les objectifs de transparence de la vie locale ne justifiaient pas qu'il soit dérogé au secret médical (conseil n° 20122788 du 26 juillet 2012), au secret de la vie privée (conseil n° 20121509 du 19 avril 2012 et conseil n° 20123242 du 27 septembre 2012), ou au secret des correspondances échangées entre le client et son avocat (avis n° 20111095 du 14 avril 2011). La commission considère, en revanche, qu'il n'y a pas lieu, en principe, d'opposer le secret en matière industrielle et commerciale sur le fondement de l'article L2121-26 du CGCT (pour les communes) ou de l'article L5211-46 (pour les établissements publics de coopération intercommunale).
La position retenue par la commission dans le présent avis remplace celle exprimée dans l’avis n° 20165893 ainsi que dans le conseil n° 20164985 du 27 avril 2017.
II. Application au cas d'espèce :
- s'agissant des documents relevant du régime d'accès du titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l'administration :
En l'espèce et en l'absence de réponse de l'administration à la date de sa séance, la commission estime que la note de synthèse visée au point I) est communicable à toute personne qui en fait la demande et donc publiable en ligne, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration. Elle émet donc un avis favorable sur ce point.
La commission rappelle ensuite qu'un document préparatoire est exclu du droit d'accès prévu par le titre Ier du livre III du code des relations entre le public et l’administration aussi longtemps que la décision administrative qu'il prépare n'est pas intervenue ou que l'administration n'y a pas manifestement renoncé, à l'expiration d'un délai raisonnable. Elle estime, par conséquent, que les documents préparatoires à la réunion du conseil communautaire du 20 novembre 2017, mentionnés au point II), sont communicables à toute personne qui en fait la demande, en application de l'article L311-1 du code des relations entre le public et l'administration, sous réserve que les décisions qu'ils préparent aient bien été adoptées lors de cette séance. Ils sont donc également publiables sous cette réserve. Elle émet donc un avis favorable dans cette mesure.
- s'agissant des documents relevant des dispositions du code général des collectivités territoriales :
La commission rappelle qu’il résulte de l'article L5211-46 du code général des collectivités territoriales que toute personne peut demander communication des délibérations et procès-verbaux des organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale, des arrêtés de leur président, ainsi que de leurs budgets et de leurs comptes dans les conditions fixées par la jurisprudence « Commune de Sète ». L’ensemble des pièces annexées à ces documents, y compris les pièces justificatives des comptes, sont communicables à toute personne qui en fait la demande. La commission en déduit que les documents visés au point III), dont elle n'a pu prendre connaissance, peuvent donc être publiés en ligne, sans qu'y fasse en principe obstacle la circonstance qu'ils comporteraient des mentions relevant du secret industriel et commercial en l'absence de toute précision apportée sur ce point par l'administration. Elle émet donc un avis favorable.